Une photo de Trump et Mark Carney qui en dit long sur la relation houleuse entre les deux leaders

OTTAWA | Donald Trump répète peut-être moins souvent ses menaces d’annexion par la force économique, mais le regard sévère qu’il a posé sur Mark Carney en Asie cette semaine en dit long sur son état d’esprit. Les négociations commerciales avec le Canada ne reprendront pas de sitôt, a-t-il confirmé hier, malgré les excuses de Mark Carney pour la publicité antitarifs de l’Ontario. C’est sur fond de guerre commerciale qui n’en finit plus que Mark Carney déposera son premier budget, mardi. C’est à ce moment que nous aurons une meilleure idée des dégâts que Trump a causés à l’économie canadienne. En attendant, Donald Trump regarde le Canada et Mark Carney avec le regard de celui qui se dit : bonne chance pour la suite, mon vieux !
Un déficit monstre
Le déficit est la donnée que tout le monde attend. Le Canada n’a pas eu de budget depuis le printemps 2024, c’est-à-dire 18 mois. Il s’en est passé des choses depuis, avec des élections fédérales et l’arrivée de Trump à la Maison-Blanche. À combien s’élèvera le manque à gagner ? 80, 90, 100 milliards $ ? Il n’est pas impossible que le déficit atteigne les trois chiffres. Afin de dorer la pilule, Mark Carney va présenter une nouvelle méthode de calcul du déficit. Celle-ci va séparer les dépenses de fonctionnement, comme les salaires et les transferts aux provinces et aux particuliers, et les dépenses en capital, comme pour les infrastructures publiques et les sommes pour attirer des entreprises.
Orgie de dépenses ?
Mark Carney veut peut-être que le fédéral dépense moins sur lui-même, mais cela ne veut pas dire qu’il souhaite moins dépenser tout court. Les économies risquent en bonne partie d’être redirigées dans des investissements pour se prémunir contre les tarifs américains. Pour stimuler la croissance, le premier ministre a promis d’injecter 9 G$ dans la défense. On s’attend à d’autres milliards dans le logement, dans de grands projets d’infrastructures dits d’intérêts nationaux et dans des façons de transformer notre économie pour être moins dépendants des Américains.
Des compressions
Mark Carney a promis un budget « d’austérité », a-t-il laissé échapper en septembre dernier, peut-être inconscient du sens qu’a pris cette expression au Québec. Quoi qu’il en soit, il compte ramener à 2 % la croissance des dépenses de fonctionnement du fédéral, contre 9 % sous Justin Trudeau, qui a multiplié les programmes sociaux. Au lieu d’annoncer des compressions immédiates majeures, Ottawa pourrait être plus discret, mais tout aussi draconien, selon le Centre canadien de politiques alternatives. Concrètement, Ottawa pourrait simplement ne pas renouveler des dizaines de programmes dont le financement vient à terme dans les trois prochaines années. Les ministères des Femmes et de l’Égalité des genres, de la Sécurité publique, des Relations Couronne-Autochtones, de l’Environnement et des Transports sont particulièrement vulnérables.
Bras de fer
Comme Mark Carney dirige un gouvernement minoritaire, l’adoption de son budget n’est pas assurée. Aucun partenaire de danse dans l’opposition ne s’est encore manifesté. D’autres élections fédérales bientôt ne sont pas impossibles. Quoi qu’en dise Mark Carney, son gouvernement est plus faible qu’il n’y paraît. Et Donald Trump en est bien conscient.




