De retour en ondes au 98,5 FM | Le « dernier tour de piste » de Stéphane Gendron

Plutôt discret dans les médias ces dernières années, Stéphane Gendron fait son retour à la radio. Depuis la rentrée, on peut l’entendre chaque lundi dans l’émission de Marie-Ève Tremblay, Radio textos, au 98,5 FM. Si l’ancien maire d’Huntingdon s’est assagi, il n’a rien perdu de la verve qui en a fait une vedette du commentariat il y a plus de 20 ans.
Publié le 3 novembre
En ondes, Stéphane Gendron ne bafouille jamais. À brûle-pourpoint, il peut s’étendre sur n’importe quel sujet d’actualité avec une aisance – et une certaine théâtralité – qui n’est pas sans rappeler les grandes voix de la radio AM avec lesquelles il a grandi. On peine à croire que cette bête médiatique n’héritera pas bientôt d’une émission à elle. Telle n’est pas son ambition, assure-t-il.
« On s’entend, à mon âge, les médias, c’est fini. C’est mon dernier tour de piste », tranche celui qui gagne maintenant sa vie comme agriculteur.
« Je ne serai pas comme Gilles Proulx à faire des podcasts à 85 ans. Gilles a été mon mentor, je l’aime beaucoup, mais à un moment donné, il faut jouir de la vie avant de crever », ajoute l’ex-politicien de 57 ans.
Certes, l’ancienne tête d’affiche de TQS est encore capable d’opinions tranchées. Mais la provocation inutile – « le trash », comme il se plaît à la qualifier – appartient à une époque révolue de sa vie.
J’aime donner mon opinion, c’est vrai. Mais je ne cherche plus la controverse. Est-ce que ça se peut que je me mette encore les pieds dans les plats ? C’est inévitable quand on fait de la radio d’opinion en direct. Mais je ne ferai pas exprès. C’est ça la différence avec avant, quand je n’étais pas capable de tirer la plogue.
Stéphane Gendron
Stéphane Gendron a appris aujourd’hui à mettre ses propres limites. Il s’interdit d’aborder en ondes certains sujets, car il sait qu’ils sont susceptibles de le faire déraper. Vous ne l’entendrez pas parler de violence conjugale, par exemple. L’enjeu est trop personnel : sa fille, l’autrice Virginie Chaloux-Gendron, a raconté en avoir été victime dans ses livres.
« Parler de ça en ondes, je me décomposerais. Quand ça vient trop me chercher, ce n’est pas bon », résume ce grand sensible, qu’on sent à fleur de peau dès lors qu’il parle de ses enfants ou de sa conjointe.
S’il a accepté de retourner au 98,5 FM, cette même station qui l’avait remercié en 2007, c’est surtout pour mettre en lumière les problèmes des régions éloignées. Trop souvent, la ruralité est évacuée de l’espace médiatique, déplore le fier résidant de Dundee, qui a consacré en 2020 un documentaire à la détresse des agriculteurs.
« Je ne m’introduis pas porte-parole de la ruralité. Mais il n’y a plus grand monde à la radio qui parle de nous. On compte pour le cinquième de la population, on nourrit le Québec, on le fournit en ressources naturelles. Mais quand vient le temps de parler de nous, ça n’intéresse pas les médias. »
Fini les excès
Au début des années 2000, c’est plutôt la rage qui l’animait. Plusieurs fois, cette envie perpétuelle de « brasser la cage » l’a amené à dépasser les bornes.
L’avocat de formation a été radié du Barreau pour avoir brûlé en direct à la télé un blâme qui lui avait été adressé après avoir qualifié une juge de « maudite épaisse ». Il avait aussi dû s’excuser après avoir traité le premier ministre Jean Charest de « meurtrier » parce que le gouvernement tardait à approuver un médicament prometteur contre le cancer.
« J’étais au sommet de ma gloire, mais ça a fini par me monter à la tête », avoue sans gêne l’ex-maire qui s’est fait connaître du grand public pour avoir tenté d’imposer un couvre-feu aux jeunes à Huntingdon.
Déjà, dans ses dernières années à la radio de Québec, Stéphane Gendron avait adopté un ton plus tempéré. En 2021, il a même fait partie du collectif Liberté d’oppression de Catherine Dorion, qui dénonçait « la montée des propos haineux, de l’intimidation et de la désinformation dans certains médias du Québec ».
Insaisissable
Longtemps associé à la droite, l’ancien maire Gendron, qui avait déjà lorgné la chefferie de l’Action démocratique du Québe (ADQ), s’est rapproché de Québec solidaire dans les dernières années. Il a même sérieusement songé à porter les couleurs du parti aux dernières élections provinciales. Lors du dernier scrutin fédéral, il dit avoir voulu se présenter pour les libéraux, qui lui ont préféré « un candidat poteau ». Il a finalement voté pour le Bloc, même si un énorme unifolié orne sa résidence, et qu’il songe sérieusement à quitter le Québec pour s’installer en Ontario.
Toutes ces tentations-là d’aller en politique provinciale ou fédérale, c’est terminé. Je n’arriverais pas à boire le Kool-Aid. À Québec et à Ottawa, même quand tu es ministre, tu n’as pas le choix de boire le Kool-Aid.
Stéphane Gendron
Le chroniqueur reste un électron libre. À travers les années, il a défendu tout et son contraire. Il a souvent changé d’idée. Certaines de ses prises de position, de prime abord contradictoires, le rendent inclassable sur le spectre politique. Alors qu’il se définit encore comme un « homme de gauche », il a fait la une du Devoir l’an dernier pour demander au président Trump de militariser la frontière afin d’empêcher le passage des migrants. Il était auparavant favorable à l’ouverture du chemin Roxham.
« Je l’admets, je suis dur à suivre, j’arrive même à surprendre encore ma blonde après 33 ans. J’assume le fait que ça m’arrive de changer d’avis. Il y a des gens qui trouvent ça dangereux en politique. Il y en a qui trouvent ça opportuniste. Mais moi, je pense que c’est du pragmatisme », tonne celui qui ne fait pas une croix sur un retour un jour en politique municipale.
Stéphane Gendron est de l’émission Radio textos présentée les lundis à 10 h au 98,5 FM et animée par Marie-Ève Tremblay.




