Mark Carney ajoute un projet minier québécois à ses grands chantiers
Dans sa volonté de faire du Canada une superpuissance énergétique, le premier ministre Mark Carney a annoncé jeudi l’ajout de six nouveaux projets d’infrastructure destinés à être accélérés. Parmi eux : la mine de graphite Matawinie, à Saint-Michel-des-Saints, dans Lanaudière.
« Ce projet va permettre de réduire les sources fortes en carbone, de renforcer la résilience canadienne en matière d’approvisionnement et de contribuer à l’accélération de la transition énergétique », a déclaré le premier ministre canadien dans un point de presse à Terrace, en Colombie-Britannique.
Il estime que le projet mené par l’entreprise québécoise Nouveau Monde Graphite, qui sera fait avec « l’hydroélectricité propre du Québec », créera un millier de nouveaux emplois et attirera 1,8 milliard de dollars en investissements.
En plus de l’exploitation d’une mine à ciel ouvert, l’entreprise québécoise prévoit aussi la construction d’une usine de transformation du graphite à Bécancour, destinée à approvisionner les fabricants de batteries pour véhicules électriques. Le projet québécois « va transformer les chaînes mondiales d’approvisionnement en batteries », s’est réjoui le chef du gouvernement.
De passage dans les bureaux de Nouveau Monde Graphique, le ministre fédéral du Commerce intérieur, Dominic LeBlanc, a pour sa part affirmé que le projet minier permettra au Canada de se démarquer dans l’exportation du graphite, en affirmant que ce minerai « critique » peut autant servir à la fabrication de batteries électriques qu’au stockage d’énergie ou à l’industrie de la défense. Il estime que le projet « créera près de 1200 emplois durant sa durée de vie ».
À ses côtés, le p.d.-g. de Nouveau Monde Graphique, Éric Desaulniers, a affirmé que le projet se développait en collaboration avec la communauté atikamekw de Manawa, près de Saint-Michel-des Saints, et celle des Abénakis de Wôlinak, à proximité de Bécancour.
Les autres projets sélectionnés sont la mine Sisson, au Nouveau-Brunswick ; le projet Crawford Nickel, en Ontario ; un projet hydroélectrique, à Iqaluit ; un projet de ligne de transport d’électricité, en Colombie-Britannique, et le projet de gaz naturel liquéfié Ksi Lisims, aussi en Colombie-Britannique, situé près du lieu où M. Carney tenait son point de presse.
Ces six nouveaux chantiers devraient générer plus de 56 milliards de dollars d’investissements et créer 68 000 emplois à travers le pays, peut-on lire dans un document du cabinet du premier ministre.
« Notre plan est de passer d’une dépendance excessive à un seul partenaire commercial à une véritable résilience face aux chocs mondiaux, et de remplacer l’incertitude par la prospérité », a déclaré Mark Carney aux côtés de la p.-d.g. du Bureau des grands projets, Dawn Farrell, également ancienne p.-d.g. de TransMountain.
Les projets annoncés jeudi s’ajoutent aux cinq premiers chantiers dévoilés par Ottawa en septembre, qui incluaient l’agrandissement du Port de Montréal à Contrecœur. Au total, le Bureau des grands projets est donc en train d’examiner 11 projets.
Une loi nécessaire ?
Une fois choisis par Ottawa, les projets sont soumis au Bureau des grands projets (BGP), qui renvoie ensuite des recommandations au gouvernement. C’est à ce dernier de décider si les projets obtiennent la désignation d’ « intérêt national » — un statut spécial permettant de les réaliser plus rapidement en contournant certaines lois environnementales.
Or, deux mois plus tard, aucun projet n’a encore obtenu la désignation d’intérêt national. Les travaux du projet d’agrandissement du Port de Montréal ont, par exemple, continué de progresser rapidement sans avoir besoin de ce statut.
La présidente-directrice générale du Port de Montréal, Julie Gascon, explique au Devoir que le projet d’agrandissement était déjà à un stade avancé avant sa sélection par le gouvernement fédéral, et que les avantages liés à une accélération n’étaient pas nécessaires. Elle souligne toutefois que le BGP facilite la coordination entre les différents départements.
La première liste de grands projets avait par ailleurs suscité des critiques chez les conservateurs, qui qualifiaient ces initiatives de « projets faciles à réaliser ».
Questionnée sur l’intérêt de retenir des projets déjà bien avancés, la p.-d.g. du BGP, Dawn Farrell, a répondu que son bureau permet à ces projets d’aller encore plus vite en optimisant les processus. « Ainsi, quelque chose qui aurait pu prendre cinq ou six ans de plus peut maintenant être réalisé en deux ans », a-t-elle déclaré jeudi.
Elle avait déjà indiqué, le mois dernier, que l’état d’avancement d’un projet serait l’un des facteurs pris en compte lors de son examen.
La mise en œuvre du BGP a été l’une des premières initiatives de Mark Carney après sa victoire aux élections générales. Les libéraux ont rapidement présenté le projet de loi C-5, qui est ensuite devenu la Loi visant à bâtir le Canada, adoptée sous bâillon au début de l’été.
L’ancien banquier a fait campagne sur la promesse de réduire la dépendance envers les États-Unis en faisant du Canada une superpuissance énergétique.
Discussions avec l’Alberta
Mark Carney a indiqué que les discussions avec le gouvernement de l’Alberta progressent bien, ce dernier réclamant toujours un projet d’oléoduc vers le nord-ouest de la Colombie-Britannique.
« Ces discussions se passent bien. Nous sommes encouragés par les progrès réalisés. Il reste encore quelques points à régler, mais j’ai hâte de voir les avancées au cours des prochaines semaines », a indiqué le premier ministre.
Il avait déjà indiqué qu’il pourrait outrepasser les lois encadrant l’évaluation de certains projets énergétiques, des lois vivement critiquées en Alberta.




