Notre combat pour les tortues marines de Mayotte

Mayotte : un joyau naturel menacé
Mayotte, plus jeune département français, est une île de l’océan Indien au patrimoine naturel exceptionnel. Son lagon, l’un des plus grands au monde, abrite un écosystème unique. Mais cet équilibre fragile est mis en péril par la pression de la pollution et du braconnage. Par manque de moyens et de volonté, le lagon ne bénéficie pas d’une réelle protection et il s’appauvrit d’année en année.
Le massacre des tortues marines
Les tortues marines menacées et protégées (au moins sur le papier) en France et à Mayotte, sont victimes d’un braconnage intensif en bande organisée, qui alimente un marché noir lucratif. La chair de cette espèce menacée est vendue jusqu’à 60 euros le kilo. Ce commerce s’étend aux Comores et jusqu’à Madagascar. Les braconniers attaquent les tortues lorsqu’elles remontent sur les plages pour pondre. Particulièrement vulnérables, elles sont tuées à la machette par centaines. Les carapaces ouvertes sont retrouvées sur le sable, les œufs gisant souvent à côté des cadavres. Car les braconniers tuent les tortues avant la ponte, au prétexte qu’après celle-ci, l’hormone sécrétée altérerait la qualité de la viande. La prochaine génération est donc également sacrifiée. De plus en plus, les braconniers cherchent à dissimuler les preuves de leurs massacres et camouflent les carapaces. Elles sont enterrées, lestées, emportées par bateau. Cette pratique vise à minimiser l’ampleur réelle du braconnage.
Depuis 2017, Sea Shepherd se mobilise sur l’île menant des patrouilles nocturnes sur les plages qui s’avèrent très dissuasives et permettent aux tortues de venir pondre en sécurité.
Notre équipe est composée de bénévoles venus de la métropole mais aussi, et surtout, de bénévoles locaux. Depuis de nombreuses années, ces derniers qui vivent dans une grande précarité patrouillent à nos côtés pour sauver les tortues marines avec un courage et un dévouement hors normes.
Les tortues marines font l’objet d’un PNA (Plan National d’Action) et d’un pacte de sauvegarde des tortues marines ; ce dernier initié par la préfecture de Mayotte en 2020 puis porté par des organismes bénéficiaires. Des millions d’euros d’argent public ont été investis pour leur protection et pourtant, elles restent dans les faits livrées aux braconniers sur la plupart des plages. Depuis maintenant 5 ans, nous constatons sur le terrain l’absence des gardiens du Conseil Départemental payés pour les protéger et parfois, leur complicité avec les braconniers. Seule une brigade dédiée à la protection effective des tortues sur les plages permettra de les sauver du braconnage et sera d’ailleurs moins coûteuse en argent public que l’énorme gaspillage actuel.
Nous saluons tout de même une évolution positive dans la prise de conscience du problème par les autorités et en particulier la volonté accrue de la gendarmerie maritime de Mayotte et de l’OFB qui se mobilisent pour procéder à des interpellations de braconniers, avec le peu de moyens mis à leur disposition pour enrayer ce fléau.
Une sous-estimation chronique du braconnage
Les chiffres du braconnage de tortues à Mayotte est très largement sous-estimé du fait des comptages de cadavres qui sont trop espacés dans le temps pour être pertinents (deux fois par mois seulement pour la plage de Papani, plus gros spot de braconnage de Petite Terre). De plus, les carapaces retrouvées ne constituent qu’une partie des victimes. Désormais, les braconniers veillent à laisser le moins de traces possibles : les carapaces sont souvent camouflées, et de plus en plus les tortues sont transportées en voiture ou en barque pour être tuées ailleurs que sur les plages. Les grandes marées emportent également les carapaces.
Le Réseau Echouage Mahorais de Mammifères marins et de Tortues marines (REMMAT) estimait ainsi que le nombre de tortues braconnées sur Moya en 2019 était de 3 dans l’année alors que lors de notre présence sur l’île, nous repoussons des dizaines de tentatives de braconnage sur cette seule plage en l’espace de quelques mois.
Nous resterons mobilisés pour les tortues de Mayotte tant que leur protection ne sera pas devenue une priorité collective, soutenue par des moyens concrets et une volonté politique affirmée.




