Grève en transport collectif | Martinez Ferrada réclame une « rencontre d’urgence » avec la STM

À peine élue, la nouvelle mairesse de Montréal, Soraya Martinez Ferrada, réclame une rencontre au sommet avec la Société de transport de Montréal (STM). Objectif : mettre fin rapidement à la grève des employés d’entretien, qui force l’interruption du métro et des autobus en dehors des heures de pointe depuis dimanche.
Mis à jour hier à 16 h 46
« Ma priorité numéro un, là maintenant, c’est la négociation avec la STM. Il faut absolument qu’on règle la question, parce que ça a un impact direct sur les citoyens à tous les jours », a martelé Mme Martinez Ferrada lors de son tout premier point de presse après son élection, à l’hôtel de ville, lundi.
Depuis trois jours, la grève des employés d’entretien de la STM perturbe le quotidien des usagers du transport collectif de la métropole. Jusqu’au 28 novembre, à moins d’une entente, le métro et les autobus ne sont en service qu’aux heures de pointe ainsi qu’en fin de soirée.
Samedi, la grève des chauffeurs a aussi forcé l’interruption totale du service, une première en 38 ans. « Il faut qu’on sache où nous en sommes. Je pense que les citoyens de Montréal veulent savoir ce qui va advenir du transport collectif. […] Je veux savoir où est rendu le mandat de médiation », a insisté la mairesse nouvellement élue.
Mme Martinez Ferrada affirme avoir convoqué une « rencontre d’urgence » avec le directeur général de la Ville, Benoit Dagenais, et la directrice générale de la STM, Marie-Claude Léonard. Elle doit se tenir « rapidement », au cours des prochains jours, mais aucun autre détail n’a été donné. Mme Léonard a dit lundi être « disponible pour rencontrer la mairesse au moment qui lui conviendra ».
PHOTO MARTIN CHAMBERLAND, ARCHIVES LA PRESSE
Marie-Claude Léonard, directrice générale de la STM
Mme Martinez Ferrada soutient n’être « pas favorable » à une loi spéciale. « Il faut respecter le droit des travailleurs de négocier », a-t-elle jugé, assurant toutefois qu’elle « mettra la pression sur la STM de négocier » en demandant à sa DG « de venir expliquer pourquoi on n’arrive pas à un accord ».
Échéancier
Selon elle, régler l’impasse entre le transporteur montréalais et ses employés syndiqués relève « d’une question d’argent, mais aussi de conditions de travail ». « L’important, ça va être d’avoir un vrai calendrier de négociations, donc des dates précises qu’on se donne, souligne-t-elle. Et il faut qu’il y ait de la bonne foi des deux côtés. »
Les litiges entre le syndicat des employés d’entretien et la STM portent sur la création d’horaires atypiques, le déplacement d’employés entre les installations, ainsi que le recours à la sous-traitance.
Mais surtout, la question des salaires n’est pas encore réglée. La STM offre une hausse de 12,5 % sur cinq ans, dont 1 % dépend de l’Indice des prix à la consommation (IPC), alors que le syndicat estime que les salaires n’augmentent pas assez vite par rapport au reste de l’industrie. Les employés du Réseau de transport de la Capitale (RTC), par exemple, ont obtenu des hausses de 18 %.
En point de presse lundi matin, le Conseil central du Montréal métropolitain (CCMM-CSN) a accusé le gouvernement du Québec d’être un « pompier pyromane » qui « sous-investit et fait le choix du transport individuel ». Les sociétés de transport collectif et les villes demandent depuis longtemps au premier ministre François Legault d’augmenter ses investissements dans les réseaux municipaux.
Quotidien chambardé
En milieu de journée lundi, les différentes stations de métro du centre-ville étaient très peu fréquentées. Quelques rares utilisateurs rebroussaient chemin après s’être butés à des portes verrouillées.
« C’est vraiment horrible. On est perturbé moralement et physiquement », affirme Celia Mektoul, rencontrée par La Presse devant la station de métro Peel. L’éducatrice en garderie de Montréal-Nord vient travailler au centre-ville et devra maintenant patienter plusieurs heures avant la reprise du service en après-midi pour rentrer chez elle, car elle est en poste le matin seulement.
Les gens doivent se déplacer et travailler. La grève, c’est un obstacle. J’ai hâte que ce soit fini, et on est juste le 3 novembre.
Celia Mektoul, usagère du métro
Ivette Eugène, aussi de Montréal-Nord, est une mère de famille qui prend des cours de francisation au centre-ville. « Ça change beaucoup pour moi, la grève. Je me suis levée à 5 h pour amener les deux petits à la garderie et ma fille à l’école. Je finis mon cours à midi et je perds des heures dans ma journée. Je suis très fatiguée, et hier j’ai rechargé la carte en plus », soupire-t-elle avec un demi-sourire, devant la station de métro McGill.
D’autres usagers ont partagé la complexité de leur gymnastique causée par la grève sur les réseaux sociaux. Edric Gabales, par exemple, réside à Dollard-des-Ormeaux et travaille à l’hôpital en ville. Il s’y rend normalement en autobus, mais a dû emprunter un taxi lundi matin, « juste pour se rendre ». Il estime qu’un mois complet sans transports en commun fiables est un « véritable défi, pas juste un inconvénient mineur ».
« Nous payons des taxes, et c’est ça qu’on obtient ? J’espère vraiment que le gouvernement va intervenir et trouver une solution bientôt. On parle de gens qui essaient de se présenter pour leur emploi, leurs patients et leurs communautés. Nous méritons mieux », nous a-t-il écrit.
Après la première grève de la STM, en juin, le groupe Transport Research at McGill (TRAM) a mené un sondage auprès de 1100 personnes, révélant que 98 % des Montréalais considèrent les transports en commun comme un service essentiel. De plus, 66 % des usagers répondaient avoir ressenti un stress important relié aux déplacements perturbés, un sentiment particulièrement présent chez les 18 à 34 ans.
Trajectoire Québec, un OBNL qui défend les intérêts des citoyens en transport collectif, reçoit des témoignages de parents dont les adolescents doivent annuler des activités parascolaires, ou de personnes âgées qui doivent reporter des rendez-vous médicaux.
« On aurait aimé que le service soit maintenu à 50 %, pour que le syndicat génère le désagrément voulu, mais que les gens puissent vaquer à leurs occupations », déclare Philippe Jacques, codirecteur général de l’organisme.
Avec la collaboration de Karim Benessaieh, La Presse




