Rapport de la VG du Canada | Les centres d’appels de l’ARC donnent des renseignements inexacts

(Ottawa) Si vous téléphonez à l’Agence de revenu du Canada (ARC), il y a de fortes chances que vous n’obteniez pas l’information que vous cherchez. Ses centres de contact ont fourni des réponses exactes aux questions sur l’impôt des particuliers dans seulement 17 % des cas entre février et mai 2025, a indiqué la vérificatrice générale du Canada, Karen Hogan, dans l’un de ses six rapports publiés mardi.
Mis à jour hier à 15 h 53
Son bureau a appelé les centres de contact de l’ARC 167 fois entre février et mai 2025 pour poser des questions générales.
Or, elle a constaté que les centres d’appels étaient mieux adaptés aux questions relatives à l’impôt ou aux prestations des entreprises qu’à celles sur l’impôt des particuliers. Ils ont été en mesure de fournir des réponses exactes aux appels concernant la fiscalité des entreprises dans 54 % des cas. L’exhaustivité des réponses à ces questions dépassait légèrement 30 %.
Les agents étaient bien moins performants pour répondre aux questions sur l’impôt des particuliers ; la VG estime l’exactitude et l’exhaustivité des réponses à ces questions à seulement 17 %.
« La quantité d’agents qui répond aux appels a un impact sur la qualité du service, mais les outils aussi ont un impact sur la qualité du service, a-t-elle expliqué en conférence de presse. L’ARC pourrait améliorer leur service en changeant les outils ou même en suivant quelques-unes de nos recommandations pour trier les appels. »
Elle suggère de distinguer les questions techniques, comme celles portant sur l’accès à un dossier personnel en ligne, et celles portant sur la fiscalité. « Je pense que la formation et l’accès pourraient être améliorés s’ils font un triage d’appels », a-t-elle observé.
Toujours selon le rapport, l’ARC semble davantage se soucier du respect des horaires de travail et des pauses dans l’évaluation du rendement de ses employés que de l’exactitude et de l’exhaustivité des renseignements fournis aux contribuables.
La Presse avait documenté à plusieurs reprises, au cours des derniers mois, les problèmes de l’ARC. Il s’agit du deuxième audit du bureau du vérificateur général sur l’agence depuis 2017.
« C’est honteux, a réagi le chef du Bloc québécois, Yves-François Blanchet. Ça mérite une intervention très rapide et le gouvernement fédéral, qui d’ailleurs essaie de s’ingérer dans les compétences du Québec et des provinces, fait extraordinairement mal son travail de base de gouvernement fédéral. »
« Pourquoi ce gouvernement force-t-il les Canadiens à payer autant pour un service aussi terrible », a demandé le chef du Parti conservateur, Pierre Poilievre, lors de la période des questions.
« Nous ne recevrons pas de leçons de ces conservateurs », a tonné le ministre des Finances et du Revenu national, François-Philippe Champagne.
Dans une déclaration, la Fédération canadienne des contribuables a affirmé que le taux d’erreur des centres d’appels de l’ARC prouve que « personne ne comprend les règles incroyablement complexes et que le gouvernement doit simplifier le code des impôts ».
« La Loi de l’impôt sur le revenu est devenue si longue et complexe que pratiquement personne ne peut la comprendre », a avancé Franco Terrazzano, directeur fédéral de la Fédération. « Embaucher plus de fonctionnaires pour donner encore plus de mauvaises réponses ne résoudra pas le problème. »
Seuls 18 % des appels entrants cette année ont respecté la norme de service de l’ARC, avec une réponse dans les 15 minutes, selon le rapport de Mme Hogan. La plupart des appelants ont attendu en moyenne 31 minutes, a-t-elle ajouté.
« L’Agence du revenu du Canada a le devoir d’aider les particuliers et les entreprises à s’acquitter de leurs obligations fiscales et à se prévaloir de prestations », a souligné Mme Hogan dans une déclaration.
« Je crains que, malgré un nouveau système de téléphonie et d’autres améliorations, les Canadiennes et les Canadiens attendent encore trop longtemps pour obtenir des réponses à leurs questions sur l’impôt. »
Améliorer le service
Le 2 septembre, le ministre Champagne a fixé un délai de 100 jours à l’ARC pour remédier aux retards dans les centres d’appels, la date limite étant le 11 décembre.
L’ARC avait alors assuré vouloir répondre à au moins 70 % des appels entrants avant la mi-octobre.
Mélanie Serjak, sous-commissaire de l’ARC responsable de la plupart des centres de contact et des services de première ligne aux contribuables, a déclaré à La Presse Canadienne la semaine dernière que son objectif avait été dépassé au début du mois.
« Je suis heureux de voir où nous en sommes, mais pas satisfait », a réagi le secrétaire d’État pour l’ARC, Wayne Long.
L’Agence a prolongé les contrats à durée déterminée d’environ 850 agents de ses centres d’appels et en a réembauché quelques centaines d’autres.
L’ARC a également indiqué qu’elle étendait son utilisation de l’intelligence artificielle (IA) dans le cadre de son plan de 100 jours visant à améliorer ses services. Elle prolonge les heures d’ouverture de son service de clavardage en ligne et augmente le nombre de questions auxquelles son agent conversationnel à IA peut répondre.
Mme Serjak a expliqué que le dialogueur d’IA actuellement à l’essai ressemble beaucoup à ChatGPT et peut être utilisé par les Canadiens pour obtenir des réponses à certaines questions non liées à leurs comptes, notamment en matière d’impôts et de prestations.
Mardi, le ministre Champagne a affirmé aux journalistes que le gouvernement était « avant-gardiste » dans la résolution des problèmes à l’ARC.
« Nous l’avions anticipé ; nous avons compris qu’il fallait améliorer les services offerts aux Canadiens, a-t-il dit. Nous avions déjà pris de l’avance en demandant d’améliorer les services, d’utiliser la technologie et d’affecter plus de personnel, car nous visons l’efficacité et, en même temps, nous voulons offrir d’excellents services aux Canadiens. »
L’Association canadienne des déclarants de revenus, une association nationale représentant une douzaine des plus importantes entreprises de préparation de déclarations de revenus et de logiciels fiscaux au pays, a affirmé dans une déclaration que le rapport de la vérificatrice générale prouve que l’ARC « a du mal à répondre aux appels depuis des années et que la situation ne s’améliore pas ».
« Aujourd’hui, la vérificatrice générale confirme que le statu quo ne suffit pas à répondre aux attentes fondamentales des contribuables canadiens, peut-on lire dans la déclaration. Un gouvernement qui souhaite sérieusement réduire la taille de la fonction publique tout en améliorant les services aux Canadiens devrait inciter notre secteur à en faire davantage plutôt que de s’appuyer uniquement sur un organisme qui peine à remplir son mandat principal. »
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