La loi spéciale sur la rémunération des médecins adoptée sous bâillon

La loi spéciale imposant aux médecins un nouveau mode de rémunération et mettant fin à leurs moyens de pression a été adoptée sous bâillon samedi, peu avant 4 h du matin.
L’adoption à 63 voix contre 27 s’est faite en présence du premier ministre François Legault.
« Il tente de frapper un grand coup en frappant sur les médecins avec un projet de loi qui n’a franchement aucun bon sens », a dénoncé après le vote le porte-parole de Québec solidaire en santé, Vincent Marissal.
En vertu de la nouvelle loi, il sera désormais interdit aux médecins de faire des « actions concertées » qui pourraient nuire à l’accès aux soins et à la formation, sous peine de lourdes pénalités.
Par exemple, trois médecins qui décideraient ensemble de quitter le réseau ou d’arrêter d’enseigner pourraient être durement sanctionnés : jusqu’à 20 000 $ d’amende par jour, mesures disciplinaires, etc.
Le seul fait d’inciter des médecins à commettre un manquement devient un acte illégal.
« C’est un triste spectacle d’un gouvernement qui fait fausse route, qui ajoute mauvaise solution après mauvaise solution », a déploré samedi matin le porte-parole libéral en santé, Marc Tanguay.
En outre, la loi impose aux médecins un nouveau mode de rémunération en partie basé sur l’atteinte d’objectifs de performance. Dans les faits, elle lie 10 % de leur rémunération à des cibles.
Par exemple, les omnipraticiens devront fournir 17,5 millions de rendez-vous chaque année. Les spécialistes, eux, devront réaliser au moins 97 % des chirurgies dans un délai d’au plus 12 mois.
En fin de soirée vendredi, le ministre Dubé a fait adopter un amendement, faisant passer l’âge des médecins qui seront exemptés de 65 ans et plus à 63 ans et plus.
Les médecins plaident depuis le début qu’ils n’ont pas les ressources nécessaires pour atteindre les objectifs que fixe le gouvernement. Le tiers des salles d’opération au Québec sont actuellement fermées, disent-ils.
Ils accusent par ailleurs Québec de vouloir une médecine « fast-food », axée sur le volume.
« Je pense aux patients, […] il faut faire les choses différemment, […] la situation actuelle n’est pas soutenable », a plaidé lors des débats le ministre de la Santé, Christian Dubé.
Furieuse, la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ) annonçait déjà vendredi qu’elle contesterait la loi devant les tribunaux.
M. Dubé a invité les médecins à laisser retomber la poussière et considérer l’ensemble de la nouvelle loi, qui comprend 214 articles, avant de prendre des décisions.
Il s’agit du huitième bâillon du gouvernement Legault depuis son arrivée au pouvoir, en 2018.




