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Bloc uni de la FTQ et de la CSN contre la réforme Boulet à «Tout le monde en parle»

Les présidentes de deux grandes organisations syndicales du Québec, Magali Picard et Caroline Senneville, ont dénoncé d’une même voix dimanche soir à Tout le monde en parle la nature « autoritaire » du projet de loi 3 du ministre du Travail, Jean Boulet, au lendemain d’une importante manifestation de la société civile contre la réforme caquiste du régime syndical.

La présidente de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ), Magali Picard, a été catégorique : le projet de loi 3 est « autoritaire » en encadrant inutilement la dynamique déjà démocratique des syndicats et en engendrant d’importantes « dépenses supplémentaires » pour des sections locales syndicales qui, par cette loi, devront débourser pour produire des états financiers vérifiés.

« Actuellement, les syndicats sont pas mal les organisations les plus démocratiques qui existent au Québec. Nos budgets se font avec nos membres. Ce sont eux qui décident sur quelles campagnes, les budgets que l’on met en dons aux organismes sans but lucratif, comment on dépense », a-t-elle affirmé, en soutenant qu’aucune compagnie du Québec ne construit ses états financiers sur de tels principes de consultation.

Affirmant renforcer la transparence et « le processus démocratique », la réforme du ministre Boulet vise notamment à rendre certaines cotisations syndicales facultatives en plus d’imposer aux organisations une série de nouvelles obligations en matière de transparence. Selon le projet de loi actuel, les syndicats seront tenus de consulter leurs membres au moins une fois par année pour déterminer s’ils peuvent percevoir des cotisations facultatives pour financer, entre autres, des campagnes de publicité, la participation à des mouvements sociaux et politiques ou encore des démarches judiciaires. Le projet de loi obligerait aussi tous les syndicats à dévoiler certains documents sur leurs finances, dont le salaire de leurs dirigeants et certaines dépenses, ainsi qu’à produire des états financiers vérifiés.

Mme Picard et la présidente de la Confédération des syndicats nationaux (CSN), Caroline Senneville, ont rappelé que les syndicats produisaient déjà des états financiers et dénoncent que la surveillance accrue du gouvernement Legault soit justifiée par des anecdotes et des erreurs qui, ont-elles fait remarquer, n’épargnent ni les entreprises privées ni la fonction publique. « Dans les syndicats, comme dans les organisations ou au gouvernement, des gens, des écarts de conduite, des dépenses qui sont inappropriées, malheureusement, il y en a partout. Mais ça n’a pas de maudit bon sens de profiter d’anecdotes comme ça pour venir sabrer dans ce qu’on a bâti au Québec depuis plus de 60 ans », a affirmé Mme Picard.

Sur la question des cotisations, Mme Senneville a fait valoir que toutes les cotisations étaient débattues lors de l’adoption du budget. Rendre facultatives certaines cotisations créerait par ailleurs une iniquité entre les travailleurs qui acceptent ou refusent de payer ces cotisations, mais qui, au final, finiraient par profiter des mêmes gains obtenus par leurs syndicats. « La démocratie à la carte, ça ne se peut pas », a affirmé Mme Picard.

Menaces de grève

L’intervention des dirigeantes syndicales fait suite à une semaine mouvementée en commission parlementaire à l’Assemblée nationale. Mardi dernier, Mme Picard avait notamment affirmé que le ministre Jean Boulet était « innocent ou faisait l’innocent » et qu’il semblait être un « slow learner », puisqu’il ne comprenait toujours pas, après sept ans en fonction, le fonctionnement des syndicats. Quelques heures avant sa comparution en commission, la présidente de la FTQ avait fait l’objet d’une motion de la Coalition avenir Québec (CAQ) la blâmant pour avoir parlé de « paralyser le Québec » devant la grogne des travailleurs et des syndicats suscitée par les projets de loi de Québec.

Samedi, des dizaines de milliers de Québécois sont d’ailleurs descendus dans les rues de Montréal pour faire entendre leur colère contre le gouvernement Legault, à la veille de l’entrée en vigueur du projet de loi 3.

Questionnées sur une possible « grève sociale » de la part des grandes organisations syndicales, Mme Picard et Mme Senneville ont rappelé que la décision allait d’abord reposer sur les centaines de milliers de membres qu’ils représentent. « Comme toute grève, c’est nos membres qui vont décider », a rappelé Mme Senneville.

N’empêche, quelle que soit l’issue, une riposte s’impose : « On a des lois qui sont autoritaires. Qu’est-ce qu’on fait ? On se laisse faire ? On laisse passer le train ? Bien non, il faut réagir. C’est à ça que ça sert la force collective », a affirmé Mme Senneville. « La grève sociale arrive habituellement lorsqu’il n’y a plus de dialogue social », a ajouté Mme Picard, en déplorant l’absence d’écoute de Québec.

Leur présence a par ailleurs donné lieu à des échanges corsés avec le ministre québécois de l’Immigration, Jean-François Roberge, venu défendre son projet de loi 9 sur la laïcité.

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