Trends-CA

Loi 2 sur les médecins | Lionel Carmant quitte la CAQ

(Québec) Lionel Carmant démissionne de ses fonctions de ministre et quitte le caucus de la CAQ pour siéger comme indépendant. Sa décision survient dans la foulée de l’adoption sous bâillon de la loi 2 et des critiques formulées publiquement par sa fille, la Dre Laurence Carmant, sur la controversée réforme du gouvernement Legault.


Publié à 9 h 39

Mis à jour à 10 h 36

Le principal intéressé en a fait l’annonce jeudi matin en conférence de presse, accompagné du premier ministre, qui est un ami personnel. M. Carmant siégera comme député indépendant.

« Après une réflexion sincère et beaucoup de discussions avec mes proches, j’ai pris la décision déchirante de quitter mes fonctions de ministre. Les dernières semaines ont été difficiles et m’amènent aujourd’hui à recentrer mes priorités. Je fais le choix de ma famille, la famille que nous avons construite, mon épouse et moi », a expliqué le ministre, avec calme.

« C’est sûrement pas facile de quitter le dossier qui me passionne, mais je crois que c’est la bonne décision pour moi et les miens. Cette décision n’est pas un renoncement, mais plutôt un choix de responsabilité. J’ai toujours cru que l’engagement politique devrait s’exercer avec équilibre, lucidité et honnêteté envers soi-même et envers les autres », a-t-il ajouté.

« Dans la vie, il faut toujours d’abord choisir sa famille. C’est ce que fait Lionel aujourd’hui. », a pour sa part affirmé M. Legault, ébranlé. Il a dit comprendre la décision de son ministre, qui est l’un des signataires du manifeste ayant mené à la création de la Coalition avenir Québec. Les deux hommes se sont fait une longue étreinte après l’annonce.

« Je peux vous dire Lionel Carmant, c’est un homme d’une valeur exceptionnelle, je le connais depuis longtemps et je connais sa famille et je comprends le déchirement qu’il vit actuellement avec sa famille », a déclaré M. Legault. « Je veux le remercier sincèrement d’avoir accepté mon invitation d’embarquer dans cette aventure un peu folle, un peu extrême qui est la politique », a-t-il ajouté.

Sa décision survient au lendemain de la publication d’une lettre au Devoir par sa fille, médecin spécialiste, qui s’en prend à la réforme du gouvernement Legault. La Dre Laurence Carmant affirmait dans sa lettre qu’elle n’aura « malheureusement d’autre choix que de partir pour une autre province » si le gouvernement québécois ne lui « permet pas de pratiquer librement ».

« Le ministre de la Santé, Christian Dubé, semble attribuer aux médecins le manque de productivité observé au Québec », écrit-elle. « Néanmoins, l’écart avec l’Ontario ne relève ni du manque de volonté ni de la paresse : c’est le symptôme d’un système profondément brisé. »

Christian Dubé, dont la réforme est directement liée au départ de M. Carmant, a limité ses commentaires. Il affirme qu’il a « beaucoup d’empathie » pour son ex-collègue. « Vous me laisserez digérer la nouvelle », a-t-il dit à l’entrée de la période de questions.

« Je suis très content de pouvoir l’avoir eu comme collègue pendant ses années. Les situations politiques ont souvent beaucoup d’impact sur nos familles. Moi j’ai vécu ça beaucoup durant la pandémie », a-t-il ajouté.

Concert d’éloges

Les réactions n’ont pas tardé à fuser. Du côté de la CAQ, les élus disent respecter le choix de M. Carmant, qui quitte le parti qu’il a contribué à fonder. « On perd un gros morceau, je lui souhaite de passer du temps avec sa famille », a dit l’ex-ministre François Bonnardel.

Le ministre de la Sécurité publique, Ian Lafrenière, est un voisin de circonscription. Il parle d’un « moment difficile » pour le parti. C’est un bon ami, un homme que j’apprécie énormément, un voisin, et avant tout on s’est lancé en politique ensemble en 2018 », a-t-il dit.

Le président du caucus, Yves Montigny, décrit un « collègue exceptionnel », d’un « humain formidable ». Son départ a créé « beaucoup de discussions » au sein de l’aile parlementaire caquiste. Mais il dit comprendre le départ. « On l’aime vraiment beaucoup Lionel », a-t-il dit.

Du côté des députés d’oppositions, il y avait des éloges pour M. Carmant. « Je veux saluer l’homme, la droiture, le courage, et son esprit de grande collaboration », a dit l’élu solidaire Vincent Marissal. Le libéral André Fortin a renchéri : « Il fait de la politique pour les bonnes raisons », a-t-il résumé. « Lionel a longtemps été ministre pour des dossiers dont j’étais porte-parole, c’est quelqu’un qui a offert ses talents, son expertise aux Québécois pour les bonnes raisons et je sais qu’il fait face à des choix déchirants au cours des dernières semaines », a ajouté M. Fortin.

Appel au calme

François Legault a indiqué que ce n’est pas aujourd’hui « une journée pour parler de la loi 2 ».

« Mais, je comprends qu’il y a des réactions très émotives. Je pense que c’est normal et d’ailleurs, j’en profite pour dire à tout le monde et dans tous les partis, incluant chez nous, de le faire dans le respect, c’est important. On peut être en désaccord tout en restant respectueux », a-t-il dit.

Un peu plus tôt cette semaine, Lionel Carmant, avait reconnu que cela n’était « pas facile à la maison » en ce moment depuis l’adoption de la loi 2. « Ma femme est médecin, ma fille est médecin, elle commence sa pratique. Et elles sont fâchées », avait-il dit.

Lionel Carmant a été chargé notamment de la mise en œuvre des recommandations de la commission spéciale sur les droits des enfants et la protection de la jeunesse, dite commission Laurent, mise en branle après la mort de la « fillette de Granby ».

PHOTO PASCAL RATTHE, ARCHIVES LA PRESSE

Lionel Carmant

Neuropédiatre de formation, M. Carmant a défendu les couleurs de la CAQ dans Taillon pour la première fois en 2018. Il est l’un des signataires du manifeste de la CAQ au moment de sa fondation, en 2011. Comme ministre, il a parfois eu l’air dépassé face à la crise de l’itinérance, et les ratés à la DPJ. Il a procédé à la création du poste de commissaire au bien-être et aux droits des enfants en 2024.

Depuis 2016, La Presse demande aux députés de l’Assemblée nationale qui, parmi leurs pairs, s’est démarqué. En 2024, M. Carmant a été choisi par ses pairs de toutes les formations politiques comme le ministre le plus apprécié du gouvernement. Il avait eu les mêmes honneurs en 2023.

Avec Marie-Eve Cousineau, La Presse

Related Articles

Leave a Reply

Your email address will not be published. Required fields are marked *

Back to top button