Mise à jour économique | Des baisses de cotisation et le prix du carbone moins cher

(Québec) Les travailleurs québécois verront leur cotisation à la Régie des rentes et au Régime québécois d’assurance parentale baisser. Les employeurs en profitent aussi, avec une baisse de cotisation de 400 millions.
Publié à
10 h 00
Mis à jour à
13 h 36
Le gouvernement Legault voulait remettre de l’argent dans le portefeuille des Québécois. Pour y arriver, il réduit les taux de cotisation au Régime de rentes du Québec et au Régime québécois d’assurance parentale, ce qui donne une économie maximale de 137 $ pour les travailleurs. Ces sommes incluent une baisse du taux de cotisation de 8 % du RQAP déjà annoncé en septembre dernier. Au total, l’allègement sera de 13 % au 1er janvier 2026.
Le ministère des Finances affirme que cela n’aura pas d’impact sur les deux régimes puisque « les plus récentes projections actuarielles […] montrent que les surplus seront persistants dans les prochaines années ».
Ce geste est « peut-être d’une moindre ampleur » que ce qui était attendu, a indiqué le ministre des Finances Eric Girard, mais il arrive très vite, en janvier, à un moment « opportun », et loin des élections générales. L’idée d’abaisser la taxe sur l’essence a été écartée, car trop coûteuse, et en contradiction avec les objectifs climatiques du Québec. Réduire la taxe pour que le prix de l’essence soit équivalent à celui de l’Ontario créerait un manque à gagner de 1,5 milliard par année, a-t-il dit.
Pour le ministre, cette mesure a le grand avantage de ne pas creuser le déficit, puisque les fonds avaient des surplus et sont financés par les cotisations des employés et des employeurs. Du côté des entreprises, Québec fait valoir que la baisse de cotisation au RRQ et au RQAP leur bénéficie également à hauteur de 400 millions de dollars par année.
Marché du carbone
Les compagnies auront droit à une deuxième économie de près 279 millions de dollars en payant moins cher que prévu pour leurs droits de polluer au marché du carbone. En effet, on note une baisse des dépenses anticipées du Plan pour une économie verte, « résultant de la diminution des revenus attendus du marché du carbone ».
Pourquoi cette baisse ? C’est parce que la Californie, seul partenaire du Québec sur ce marché, déposera un règlement diminuant les contraintes pour les entreprises sur ce marché d’échange de droits d’émission de gaz à effet de serre, explique-t-on. Cela a pour effet de diminuer le prix des unités sur le marché, communément appelées les droits de polluer. Québec compte emboiter le pas et faire une annonce prochainement. Mais déjà, la baisse se fait sentir : depuis un an, le prix est passé à près de 50 dollars la tonne à une quarantaine de dollars, a noté M. Girard.
C’est difficile pour le Québec et la Californie de garder le cap. On aurait aimé resserrer les règles et faire monter le prix [du droit de polluer]. Mais on est obligé d’ouvrir les fenêtres et de regarder ce qui se passe dehors.
Eric Girard, ministre des Finances
Cela voudrait dire, approximativement, que le prix de l’essence diminuerait de 2,3 ¢/litre. « Comme les changements de prix sont laissés aux distributeurs, leur pouvoir de marché pourrait faire en sorte qu’on ne voit pas complètement la baisse, si baisse il y a, se refléter sur le prix à la pompe », dit l’expert Pierre-Olivier Pineau, titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal. Il estime pour sa part que le prix du carbone devrait continuer de monter, malgré les prévisions du ministère des Finances du Québec.
PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, LA PRESSE
Eric Girard
Aide pour la forêt
Québec promettait des mesures pour les plus vulnérables. Cela passe surtout par une enveloppe d’environ 12 millions de dollars par année pour bonifier le programme d’adaptation de domicile, et le programme RénoRégion, deux enveloppes coupées par le gouvernement Legault dans le dernier budget. François Legault avait reconnu qu’il s’agissait d’une erreur. Il s’agit donc d’un retour en arrière. Pour l’année 2025-2026, Québec prévoit également une aide d’urgence de 5 millions en itinérance.
Le premier ministre a lâché une bombe il y a quelques semaines en affirmant que la moitié des emplois liés à la forêt — 30 000 sur 60 000 – pourraient disparaître. Depuis, le gouvernement Legault rappelle qu’il n’a pas l’intention d’abandonner ce secteur névralgique aux régions du Québec.
Dans le contexte de guerre commerciale, Québec prévoit près de 250 millions de dollars donnés sous forme d’un « congé temporaire de taxe sur la masse salariale », pour « agir immédiatement pour soutenir des secteurs essentiels à la vitalité régionale ». La mesure est cependant critiquée par la Fédération québécoise des municipalités, qui affirme que cela n’aidera pas les opérateurs forestiers à l’arrêt, qui ne peuvent plus payer les emprunts sur leur machinerie.
Déficit de 12,4 milliards
Le déficit prévu pour l’année en cours dégonfle un peu par rapport aux prévisions du budget de mars, mais il demeure à un niveau jamais vu en chiffres absolus. Il passe de 13,6 à 12,4 milliards, après le versement au Fonds des générations qui sert à réduire le poids de la dette.
Québec récolte plus de revenus qu’anticipé, principalement 1,6 milliard au chapitre des impôts des particuliers et des entreprises.
Les dépenses de portefeuilles augmentent légèrement par rapport aux prévisions, un peu plus de 300 millions. C’est à cause de l’annulation de compressions dans le réseau scolaire. Et le ministère de la Santé touche 250 millions de plus, afin de financer la hausse du coût des médicaments et une augmentation du nombre d’actes faits par les médecins.
Pour l’année en cours et les deux prochaines années, la croissance moyenne des dépenses des ministères de la Santé et l’Éducation sont limitées à 2,1 % et 1,6 %. Cette hausse ne couvre pas l’augmentation des fameux « coûts de système » – la croissance des dépenses liées par exemple à l’inflation et aux hausses salariales. Les deux ministères devront réaliser des économies à l’interne pour dégager les sommes nécessaires afin de couvrir ces coûts, explique-t-on.
Québec dispose toujours d’une « provision pour éventualités » de 2 milliards. Le gouvernement Legault prévoit toujours un retour à l’équilibre budgétaire en 2029-2030, « sous réserve de la résorption [d’un] écart » à résorber. Pour arriver à ce déficit zéro, il faut toujours trouver 2,5 milliards par année.
Ils ont dit :
Le gouvernement de la CAQ tourne le dos à la lutte aux changements climatiques. Ils prennent l’argent du fonds vert payé par le marché du carbone pour l’envoyer au Fonds des générations, alors qu’il devrait servir à la lutte aux changements climatiques, ou pour payer du transport collectif.
Alejandra Zaga Mendez, députée de Québec solidaire
Quand François Legault nous a dit qu’il y aurait 30 000 travailleurs de la forêt qui perdraient leur job, bien, là-dedans, aujourd’hui, c’est des peanuts, ce qu’on leur donne. Il dit qu’il va les aider, mais il ne les aide absolument pas.
André Fortin, chef parlementaire du Parti libéral du Québec
Ce n’est pas parce qu’on répète le mot “optimisation” à outrance qu’ils remplissent leurs engagements. On remarque que les dépenses n’ont pas diminué par rapport aux prévisions de mars dernier, elles ont même légèrement augmenté.
Pascal Paradis, député du Parti québécois
Réduire des cotisations à différents fonds pour des entreprises de récolte et de transport de bois à l’arrêt, qui ne versent donc pas de salaire, n’apporte aucune nouvelle liquidité et ne constitue pas une réponse efficace à la situation actuelle.
Jacques Demers, président de la Fédération québécoise des municipalités




