Cosaques russes: un outil de mobilisation pour Moscou en Ukraine

En février 2025, environ 18 500 soldats et 50 000 réservistes Cosaques combattent dans les rangs russes sur le front ukrainien. L’identité cosaque, “enracinée dans des valeurs traditionnelles, la prouesse martiale, la préparation militaire, une religiosité orthodoxe et une culture non influencée par un Occident « corrupteur »”, est utilisée comme un nouveau vecteur de mobilisation de la jeunesse russe dans la guerre contre Kyiv, rapporte une enquête de Bellingcat.
A l’époque de l’empire russe, les Cosaques, présents en Russie et en Ukraine, vivent dans des hostas (communautés) organisées militairement et dirigées par un chef appelé Ataman. Côté ukrainien, hostiles au joug polonais et aux Juifs, ils réclament la protection du tsar en 1654, ce qui débouche sur trois siècles de domination russe de l’Ukraine. Acquis à la cause du tsar, ils sont réprimés après 1917.
Renaissance cosaque dans l’ombre du Kremlin
Après l’effondrement de l’URSS, un mouvement de “renaissance” de cette identité débouche dès 2005 sur la création d’unités cosaques au sein de l’armée et de la police russe. De nouvelles organisations sont créées partout en en Russie, y compris dans des régions où ils ne sont habituellement pas présents.
En 2018, Poutine réaffirme son contrôle en les regroupant au sein de la Société panrusse des cosaques, écartant au passage les Cosaques opposés au Kremlin. Celle-ci est dirigée depuis novembre 2023 par l’Ataman Vitaly Kuznetsov, un général cosaque, qui priorise “le développement des sociétés militaires cosaques dans tous les domaines : éducation, culture, histoire et, surtout, [la] jeunesse.”
75 des 83 subdivisions de la Fédération de Russie disposent de leur “armée cosaque”. En 2018, l’armée cosaque de Crimée (péninsule ukrainienne annexée par la Russie en 2014), ou “armée de la mer Noire”, a été reconnue officiellement par la Russie, alors que l’héritage cosaque représente aussi une composante importante de l’identité nationale ukrainienne.
Des bancs de l’école aux tranchées
“Les organisations cosaques russes sont très actives dans les régions ukrainiennes occupées”, indique à Bellingcat le Dr Marcello Fantoni, professeur adjoint invité à l’Université de Miami. “[Elles] recrutent des résidents locaux qu’elles déploient ensuite à des fins culturelles et militaires”, ce qui permet à la Russie “de contester, voire de s’approprier, un élément central de l’identité nationale ukrainienne : le cosaque.”
Plus de 300 000 élèves étudient dans des écoles cosaques. 31 corps de cadets cosaques sont présents en Russie, ainsi que 26 universités cosaques. Enfin, 163 000 jeunes sont membres de l’Union de la jeunesse cosaque, et 5 500 jeunes cosaques ont suivi une formation militaire en 2023. D’autres organisations cosaques mobilisent des jeunes.
L’histoire d’Oleg Monin montre les conséquences tragiques de cet embrigadement. En 2024, le jeune russe rejoint l’organisation clandestine de jeunesse cosaque Berkut. Il s’y entraîne au combat avec des vétérans du front ukrainien. Il arrête les études et s’engage dans un bataillon de volontaires cosaques. Le 10 février 2025, il est tué au combat à l’âge de 19 ans.




