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Avant la CAN, le Maroc en plein boom : «C’est prodigieux ce qui a été fait en si peu de temps»

Lekjaa : « Pourquoi ne pas imaginer des compétitions euro-africaines ? »

Fouzi Lekjaa, le président de la Fédération marocaine, dévoile la stratégie de son pays pour devenir un acteur majeur du continent et quelques pistes de réflexion novatrices.
« Après un peu plus de dix ans à la tête de la Fédération, quel regard portez-vous sur l’évolution du foot au Maroc ?
Pour poser un regard, il faut comprendre quelle philosophie nous anime. Nous n’avons jamais été dans une logique de résultats liés à une compétition. Nous avons voulu travailler en profondeur, les infrastructures, la formation. Donner aux jeunes Marocains les conditions du professionnalisme total.
Le talent a toujours été là mais il fallait travailler sur le segment des 10-20 ans. Il a fallu consolider la force de notre institution sans tout remettre en cause aux premiers vents contraires. Nous avons fait du temps un allié inestimable. Le dernier point, c’est l’horizontalité, nous n’avons pas voulu tout focaliser sur le foot à 11 en équipe nationale masculine, mais sur tous les footballs.
Nous n’avons pas choisi la voie de la facilité. Mais nous sommes persuadés que nous avons pris le chemin le plus pérenne car nous mettons de l’excellence dans tous les domaines. Attention : travailler en profondeur ne signifie pas travailler lentement. Au contraire, pour combler le « gap » qui nous sépare des tout meilleurs, il a fallu aller à un rythme de développement bien plus élevé que la moyenne des autres nations.
Comment a été établi le diagnostic des chantiers à mener ?
Tout est dans les Assises Nationales du Sport de 2008 et la Lettre Royale envoyée à cette occasion par Sa Majesté Mohammed VI : faire du sport un levier de développement humain et d’éducation citoyenne, en appelant à la professionnalisation du secteur et à l’élargissement de la pratique sportive chez les jeunes et chez les femmes, ainsi qu’à la modernisation des structures.
On réfléchit déjà à l’après-Mondial 2030 qui ne doit pas être une fin en soi. Pour mener à bien cette vision, il a fallu s’appuyer sur la passion, s’immerger pleinement, faire ce travail patient d’écoute, de consultation, de dialogue, afin d’établir un audit. La clé, c’est la capacité à décider et à agir. Cela a un coût évidemment. Mais on n’évalue jamais le coût de la non-décision, souvent bien plus élevé.
Y a-t-il aussi la volonté de rayonner à l’international ?
Évidemment, derrière chaque projet d’envergure, il y a du soft power. Mais ça ne résume pas à cela non plus. Prenez l’organisation du Mondial 2030 avec l’Espagne et le Portugal, c’est aussi une question civilisationnelle liée à notre histoire commune. Le Maroc a toujours été le relais entre la civilisation africaine et européenne.
La Coupe du monde est un moment fort pour rafraîchir cette mémoire et envoyer le message que ce pourtour méditerranéen n’est pas condamné à ne traiter que des questions d’immigration et de sécurité, certes indispensables. Il peut redevenir aussi un espace de coopération entre nos peuples. Ici, nous considérons donc que ce sera une Coupe du monde Afrique-Europe.

À quoi pourrait ressembler l’après-Mondial 2030 ?
Un des défis majeurs du football va être sa capacité à être en phase avec la mondialisation. Nous sommes encore dans un football continental, avec les mêmes organisations institutionnelles des origines : la FIFA et des confédérations. Seule l’organisation des compétitions a évolué. Comment parler de mondialisation du football quand sa valeur ajoutée est aussi inéquitablement partagée ?
Donc cette Coupe du monde centenaire partagée entre deux continents doit être le coup d’accélérateur du « process » de ce partage. Pourquoi ne pas envisager des compétitions euro-africaines ? En clubs, en jeunes, etc. Pourquoi ce rapport Afrique-Europe ne s’inscrirait que dans une logique mercantile de recrutement de talents africains vers l’Europe ? Pourquoi ne pas structurer davantage cette relation et construire un véritable pont ? Le Maroc veut porter cette voix. » D. A.

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