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Loi spéciale | Christian Dubé en appelle « au sens du devoir » des médecins

(Québec) La colère gronde dans le milieu médical au moment où Québec choisit la méthode forte : il déposera vendredi une loi spéciale pour mettre fin aux moyens de pression des médecins et changer leur mode de rémunération. Christian Dubé en appelle maintenant « au sens du devoir » des médecins et les invite à rentrer dans les rangs.


Publié à 10 h 17

Mis à jour à 10 h 53

Le premier ministre François Legault a laissé entendre jeudi que la loi spéciale contiendrait des mesures pour empêcher l’exode de médecins vers le privé ou d’autres provinces, comme l’Ontario, sans les détailler.

« C’est normal qu’il y ait une certaine résistance », a lancé pour sa part le ministre de la Santé. « Je me fie énormément au sens du devoir des médecins. Je me fie énormément à ça parce que je connais beaucoup de médecins qui disent qu’on doit changer notre façon de faire parce que le statu quo n’est pas acceptable », a-t-il ajouté à son arrivée à la période de questions.

Les médecins sont furieux depuis que le gouvernement Legault a annoncé qu’il coupera court aux débats en imposant une loi spéciale à l’Assemblée nationale pour mettre fin aux moyens de pression et adopter le controversé projet de loi 106, qui prévoit de lier 15 % de la rémunération des médecins à des indicateurs de performance. L’opposition a décrié ce recours au bâillon pour faire adopter la réforme.

Les parlementaires devraient donc siéger exceptionnellement ce vendredi en tenant une séance extraordinaire. La loi spéciale pourrait donc être adoptée quelque part dans la nuit de vendredi à samedi ou tôt samedi matin.

« Ce que M. Legault a fait [mercredi] c’est qu’il a craché en plein visage des médecins spécialistes », a tonné le président de la Fédération des médecins spécialistes du Québec (FMSQ), le Dr Vincent Oliva, au micro de Patrick Lagacé, au 98,5 FM. « On vous gèle, on vous coupe, puis travaillez, puis fermez votre gueule », a-t-il ajouté. La veille la FMSQ a rejeté la dernière proposition du gouvernement déposée mercredi matin.

La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec (FMOQ) a voulu mettre de l’eau dans son vin jeudi en annonçant qu’elle « accepte de suspendre le boycottage de l’enseignement aux étudiants en médecine » comme l’a demandé le chef libéral Pablo Rodriguez et qu’elle est disponible pour « poursuivre des négociations intensives » avec Québec pour en arriver à une « entente juste et durable ».

Cela n’a pas semblé convaincre le premier ministre. « S’il y a des avancées significatives avec la FMOQ ou la FMSQ, on est prêt à bouger, mais pour l’instant, il n’y a pas eu d’avancées […] entre autres sur le principe de base [de changer le mode de rémunération des médecins] », a commenté M. Legault.

Le ministre Dubé a parlé de la sortie de la FMOQ comme d’une « bonne nouvelle ». Or, quelques minutes avant il prévenait que son gouvernement ne reculerait pas si les fédérations proposent de « petits changements pour encore une fois retarder le processus de deux trois semaines ».

Il faudrait que ça soit des avancées significatives parce que ça fait plusieurs fois qu’on nous dit “oui, on va en discuter”, mais on est arrivé […] avec des offres qui étaient tellement loin que ça dénaturait le projet de loi [106].

Christian Dubé, ministre de la Santé

La procédure législative d’exception, communément appelée « bâillon », permet au gouvernement d’adopter de manière accélérée le projet de loi, en sautant les étapes législatives normales. C’est sera huitième bâillon du gouvernement Legault depuis son arrivée au pouvoir en 2018.

L’opposition insatisfaite

Le Parti libéral du Québec a demandé aux fédérations médicales de suspendre dès maintenant leurs moyens de pression et à Québec de retirer son projet de loi pour en venir à un texte législatif « consensuel » entre les parties. « Le facteur de la rémunération des médecins, c’est un élément parmi tant d’autres, on a devant nous un gouvernement incompétent, incapable de faire quoi que ce soi, qui est en fin de régime et qui s’est inventé une guerre », a pesté le porte-parole libéral en santé, Marc Tanguay.

PHOTO EDOUARD PLANTE-FRÉCHETTE, ARCHIVES LA PRESSE

Marc Tanguay, député de Lafontaine.

« François Legault est incapable de gérer les problèmes au Québec sans créer le chaos, créer de la chicane, sans créer de bouc-émissaires », a déploré de son côté la cheffe parlementaire de Québec solidaire, Ruba Ghazal, qui l’accuse de sortir « la matraque » contre les médecins pour faire diversion sur le mauvais bilan du gouvernement caquiste.

« Les moyens de pression de la FMSQ sont absolument scandaleux. Il faut qu’ils lèvent les moyens de pression. Mais est-ce que la loi spéciale, c’est le bon moment, c’est le bon moyen lorsqu’on dit qu’en même temps on va enfoncer à travers la gorge du Québec et du réseau un projet de loi qui ne règle rien dans les problèmes d’accès à des soins de santé de qualité ? », a demandé le député péquiste Joël Arsenault.

Québec a déposé mercredi une offre « finale » aux médecins qui prévoit l’ajout de professionnels de la santé, l’ouverture de blocs opératoires et du financement additionnel. Il propose aussi de lier le salaire des PDG des établissements et des VP de Santé Québec à des indicateurs de performance.

Avec Charles Lecavalier, La Presse

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