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Grève à la STM | Pro, pro, pro ! Productivité !

So, so, so ! Solidarité ! Ce bon vieux cri de ralliement syndical sonne terriblement faux dans le contexte de la grève de la STM qui paralyse les transports en commun.


Publié à 5 h 00

Solidarité envers qui, au juste ?

Certainement pas envers les malades qui n’arrivent pas à se rendre à l’hôpital, les démunis qui n’ont pas le luxe de payer un taxi pour aller à la banque alimentaire, les étudiants qui se retrouvent encore avec des cours à distance, les personnes âgées ou handicapées qui ne peuvent pas se déplacer…

Ce sont les plus vulnérables de la société qui paient le prix de cette grève déclenchée par des travailleurs privilégiés.

Ils ont l’avantage de travailler pour une société publique qui fournit un service assez névralgique pour que sa suspension mette la population dans un sérieux pétrin… sans être suffisamment essentiel pour que le Tribunal administratif du travail (TAT) interdise le débrayage.

Forts de ce puissant levier de négociation, les employés d’entretien de la Société de transport de Montréal (STM) réclamaient initialement des augmentations de salaire de 25 % sur cinq ans, deux fois plus que l’offre de la STM (12,5 % sur cinq ans, 2,5 % par an).

Leur syndicat signale que d’autres travailleurs ont obtenu beaucoup plus, notamment dans le transport collectif à Québec (18 % sur cinq ans, 3,6 % par an) ou dans la construction (22 % sur quatre ans, 5,5 % par an).

Mais à ce jeu de comparaison, on risque de créer une spirale qui ne fera qu’alimenter l’inflation. À la fin, ce sont les usagers du transport en commun qui paieront leur titre de transport plus cher. À ce compte, on risque de décourager la population d’adopter le transport collectif.

Le syndicat plaide pour un rattrapage. Il est vrai que l’inflation a grugé le pouvoir d’achat de tous les Québécois. Mais les employés de la STM sont mal placés pour parler de rattrapage, puisqu’ils jouissent de conditions très favorables.

Par exemple, un préposé à l’entretien gagne un salaire de base de 67 000 $. Grosso modo, c’est 50 % de plus que des postes comparables dans le reste du marché du travail, selon l’Institut de la statistique du Québec.

En ajoutant les primes et les heures supplémentaires, les préposés de la STM bonifient leur salaire d’un tiers, ce qui leur procure des gains annuels moyens de 91 151 $ par année. Le quart d’entre eux gagnent plus que 100 000 $.

À cela, il faut ajouter environ 18 % pour le régime de retraite et les avantages sociaux, une denrée rare du côté privé.

De leur côté, les chauffeurs d’autobus ont un salaire moyen de 73 000 $, qui grimpe à 98 000 $ en incluant les primes et les heures supplémentaires. Avec une formation de niveau secondaire, ils gagnent plus que bien des universitaires !

Si les conditions de travail étaient insuffisantes, la STM aurait du mal à recruter et à retenir ses employés. C’est loin d’être le cas. Le taux de roulement volontaire (sans les retraites) est de seulement 1,3 % pour les employés d’entretien et 1,9 % pour les chauffeurs. Pour l’ensemble du marché du travail, on est autour de 10 % au Canada, selon Mercer, ce qui signifie qu’un employé sur dix quitte son poste chaque année.

Pour certains métiers, comme les briqueteurs, la rémunération de la STM est mieux en phase avec le reste de l’industrie. Et le recrutement est plus difficile. Cela milite pour des augmentations différenciées, afin de tenir compte de la réalité du terrain.

Le conflit de travail ne doit pas devenir un instrument pour extorquer en situation monopolistique des salaires largement supérieurs à ceux qu’on retrouve pour des postes comparables du côté privé.

Ne l’oublions pas, la société de transport est dans une situation financière difficile. Un audit de performance des grandes sociétés de transport, réalisé par Raymond Chabot Grant Thornton, démontre qu’il y a un manque de productivité à la STM1.

Qu’est-ce qui cloche ? La convention collective limite l’utilisation optimale des ressources.

Entre autres, le cloisonnement des métiers fait qu’il est impossible de demander à un employé de réaliser une tâche qui doit alors être confiée à un autre employé en heures supplémentaires. Or, le recours aux heures supplémentaires fait augmenter l’absentéisme (19 % chez les chauffeurs, c’est énorme). Et cela donne lieu à encore plus d’heures supplémentaires.

Plus de flexibilité serait donc gagnant pour tous.

Il serait aussi plus efficace de confier certaines activités périphériques en sous-traitance. Un exemple ? Pour pomper les eaux usées, la STM a un camion qui coûte une fortune à entretenir et à réparer. Comme il sert rarement, il serait plus logique de faire appel à une entreprise spécialisée, en affectant les employés à d’autres tâches.

Les employés de la STM méritent des conditions de travail qui leur permettent de gagner leur vie honorablement. Mais les droits acquis ne doivent pas devenir un frein à l’efficacité.

Pro, pro, pro ! Productivité !


1. Consultez l’audit de Raymond Chabot Grant Thornton

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