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Le Canada perd son statut de pays ayant éliminé la rougeole

(Toronto) Le Canada a officiellement perdu le statut de zone exempte de rougeole qu’il détenait depuis 1998, entraînant la perte de ce statut pour l’ensemble des Amériques.


Publié à 9 h 28

Mis à jour à 16 h 44

Hannah Alberga

La Presse Canadienne

Ce statut est accordé et révoqué par l’Organisation panaméricaine de la santé (OPS), le bureau de l’Organisation mondiale de la santé pour la région des Amériques. L’OPS a annoncé lundi que le Canada ne pouvait plus se considérer comme exempt de rougeole après avoir confirmé la transmission continue de la même souche du virus pendant plus d’un an.

« Cela signifie que l’ensemble des Amériques a également perdu ce statut », a déploré le Dr Jarbas Barbosa, directeur de l’OPS, lors d’une conférence de presse.

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« Si un seul pays de notre région perd ce statut, la région le perd en même temps que le pays. Mais les 34 autres pays restent exempts de rougeole », a précisé le Dr Barbosa, faisant la distinction entre le statut régional et celui de chaque pays.

La région n’avait toutefois retrouvé ce statut que l’an dernier, après que le Venezuela et le Brésil eurent maîtrisé leurs épidémies. Ces pays avaient perdu ce statut en 2018 et 2019, respectivement.

Le Venezuela s’est rétabli grâce à un programme de surveillance rigoureux et continu qui a permis de détecter et de contenir les cas avant qu’ils ne se propagent, a détaillé le Dr Daniel Salas, directeur exécutif du Programme spécial de vaccination intégrale de l’OPS, lors de la conférence de presse.

Le Dr Salas a également indiqué que le Brésil avait identifié précisément les zones où vivaient des enfants non vaccinés et avait ciblé ces foyers.

De même, il a souligné que le Canada devra concentrer ses efforts sur les communautés tissées serrées de personnes non vaccinées au sein desquelles la rougeole s’est principalement propagée.

Cette année, plusieurs autres pays voisins ont été touchés par des épidémies.

L’OPS a indiqué que près de 12 600 cas de rougeole ont été signalés dans 10 pays de la région, le Canada, le Mexique et les États-Unis représentant environ 95 % de ces cas.

Cela représente une augmentation de 30 fois par rapport à 2024.

Des épidémies sont également en cours en Bolivie, au Brésil et au Paraguay, mais le Dr Salas s’est dit optimiste quant à l’interruption de la propagation avant que ces pays n’atteignent le cap des 12 mois de transmission continue.

L’épidémie de rougeole au Canada a débuté au Nouveau-Brunswick en octobre 2024 et a touché plus de 5000 personnes au Canada, dont deux nourrissons en Ontario et en Alberta, infectés par la rougeole in utero et décédés après leur naissance.

L’Ontario, considéré comme l’épicentre de l’épidémie au pays pendant des mois, a déclaré la fin de son éclosion en octobre après avoir recensé plus de 2000 cas.

L’éclosion de la même souche se poursuit en Alberta, où près de 2000 personnes ont contracté cette maladie hautement contagieuse jusqu’à présent. La Colombie-Britannique, le Manitoba, la Nouvelle-Écosse, l’Île-du-Prince-Édouard, le Québec, la Saskatchewan et les Territoires du Nord-Ouest ont également enregistré des cas.

Seuls 36 cas ont été recensés au Québec en date du 25 octobre. Santé Québec ne signale actuellement aucun lieu possible d’exposition dans la province. L’éclosion a pris fin le 19 avril, selon les autorités québécoises.

Le pays pourra recouvrer son statut lorsque la transmission de la souche associée à l’épidémie sera interrompue pendant au moins 12 mois.

« Bien que la transmission ait ralenti récemment, l’épidémie persiste depuis plus de 12 mois, principalement dans les communautés sous-vaccinées », a déclaré l’ASPC dans son communiqué.

La baisse des taux de vaccination

L’agence fédérale indique collaborer avec l’OPS et ses partenaires fédéraux, provinciaux et territoriaux afin d’accroître la couverture vaccinale, de renforcer le partage des données et d’améliorer la surveillance et les recommandations.

Les experts en santé publique et en maladies infectieuses attribuent le retour de la rougeole à la baisse des taux de vaccination, elle-même alimentée par la désinformation, la réticence à se faire vacciner et la méfiance envers les autorités, ainsi que par la perturbation des programmes de vaccination de routine durant la pandémie de COVID-19.

Le Dr Brian Ward, professeur de microbiologie des maladies infectieuses au Centre universitaire de santé McGill, a qualifié de situation embarrassante le fait de perdre le statut d’élimination de la rougeole.

« Nous sommes un pays riche qui, du moins en théorie, croit en des soins de santé fondés sur la science et les données probantes. Je pense que nous sommes très fiers du fait que nous ayons un système de santé vraiment solide », a dit le Dr Ward.

Malgré l’existence d’un vaccin « efficace et remarquablement sûr, nous n’avons pas encore trouvé le moyen de convaincre la population que c’est la bonne chose à faire ».

Selon lui, réformer le système de soins primaires au Canada afin que les médecins et les infirmières praticiennes aient plus de temps à consacrer aux parents inquiets est une étape importante pour rétablir la confiance envers la vaccination.

« Les parents de ces jeunes enfants ne sont pas de mauvaises personnes. Ils tentent de faire de leur mieux pour leurs enfants », a soutenu le Dr Ward.

« Convaincre quelqu’un qui a peur des vaccins en seulement cinq ou dix minutes d’entretien, alors qu’il faut déjà gérer toutes les autres préoccupations, n’est pas chose facile. Je dirais même que c’est impossible. »

La rougeole, l’une des maladies les plus contagieuses au monde, nécessite une couverture vaccinale de 95 % pour atteindre l’immunité collective.

Selon l’OPS, la couverture vaccinale régionale pour la deuxième dose de vaccin contre la rougeole était bien en deçà de cet objectif en 2024, avec une moyenne de 79 %.

« La vaccination contre la rougeole est le meilleur moyen de protéger les Canadiens et leurs familles », a rappelé Guillaume Bertrand, porte-parole de la ministre fédérale de la Santé, Marjorie Michel, dans un courriel envoyé lundi.

« La ministre Michel suit la situation de près et travaille avec l’ASPC, ainsi qu’avec ses homologues provinciaux et territoriaux, afin que le Canada puisse rétablir son statut de pays exempt de rougeole. »

Avec la collaboration de Nicole Ireland

La couverture en santé de La Presse Canadienne est soutenue par un partenariat avec l’Association médicale canadienne. La Presse Canadienne est seule responsable de ce contenu journalistique.

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