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France | Panique au Louvre

Les bijoux dérobés ont une valeur « inestimable »

Mis à jour hier à 23 h 04

(Paris) On croyait ces opérations réservées à la fiction. Des cambrioleurs ont dérobé huit bijoux royaux dans une salle du Louvre, dès l’ouverture du musée dimanche matin, emportant avec eux des artefacts inestimables et un morceau d’orgueil des Français.

Les quatre voleurs se sont directement introduits dans la salle qu’ils visaient grâce à un camion doté d’une nacelle, à partir de laquelle ils ont coupé les vitres à la scie électrique. Aucun équipement sophistiqué, aucun stratagème digne d’Arsène Lupin n’a été nécessaire pour cambrioler le plus célèbre musée du monde.

Au total, l’opération n’aura duré que sept petites minutes. Les cambrioleurs ont tous réussi à s’enfuir. Un neuvième bijou, endommagé, a été abandonné ou échappé dans la rue. Personne n’a été blessé.

Certains des bijoux volés, photographiés en 2020

  • PHOTO STEPHANE DE SAKUTIN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    Le collier et les boucles d’oreilles de la parure d’émeraudes de l’impératrice Marie-Louise, en 2020

  • PHOTO STEPHANE DE SAKUTIN, AGENCE FRANCE-PRESSE

    Les parures de la reine Marie-Amélie et de la reine Hortense en 2020

  • PHOTO STEPHANE DE SAKUTIN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

    La couronne de la reine Eugénie, qui a été retrouvée endommagée à l’extérieur du musée

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Pour Nathalie Bondil, muséologue et ex-directrice du Musée des beaux-arts de Montréal, un tel évènement est le pire cauchemar de tout le monde muséal.

« La mission première de tout conservateur ou directeur de musée, c’est d’assurer la sécurité des œuvres pour les mettre à la disposition du public et les transmettre aux futures générations », a-t-elle dit, dimanche soir, en entrevue avec La Presse. Depuis 2021, la Franco-Canadienne dirige le volet muséal de l’Institut du monde arabe, à Paris.

En l’occurrence, le « drame » est d’autant plus profond qu’« on parle de trésors nationaux », a-t-elle ajouté.

Ce sont des objets qui sont les symboles de l’État. Ils ont une valeur en termes de préciosité, mais ils ont surtout une valeur symbolique extraordinaire.

Nathalie Bondil, muséologue et ex-directrice du Musée des beaux-arts de Montréal

En début de soirée, Emmanuel Macron a promis de mettre la main au collet de ceux qui ont volé l’« Histoire » de France. « Nous retrouverons les œuvres et les auteurs seront traduits en justice, a-t-il écrit sur les réseaux sociaux. Tout est mis en œuvre, partout, pour y arriver. »

PHOTO DIMITAR DILKOFF, AGENCE FRANCE-PRESSE

Le camion à nacelle utilisé par les voleurs

Plusieurs milliers de diamants

Les bijoux dérobés dimanche ont appartenu aux toutes dernières têtes couronnées de France, au début du XIXe siècle.

Selon la liste officielle publiée par le ministère de la Culture, les cambrioleurs se sont emparés de deux bijoux en émeraude de l’impératrice Marie-Louise (la deuxième épouse de Napoléon Bonaparte), ainsi que d’un diadème et d’une broche de l’impératrice Eugénie (l’épouse de Napoléon III, neveu de Napoléon Bonaparte).

PHOTO GONZALO FUENTES, REUTERS

Vitre vraisemblablement fracassée par les voleurs

Ils ont aussi mis le grappin sur un diadème, un collier et des boucles d’oreille de la reine de France Marie-Amélie (sur le trône de 1830 à 1848) et de la reine de Hollande Hortense (1806-1810). Cette dernière était la belle-fille de Napoléon.

Ces bijoux totalisent plusieurs milliers de diamants, ainsi qu’un florilège d’autres pierres précieuses.

Se pourrait-il que le forfait ait été commis pour le compte d’un riche commanditaire qui souhaitait acquérir ces trésors impossibles à acheter ? Nathalie Bondil souligne que les objets liés à Bonaparte continuent à susciter la fascination de plusieurs collectionneurs dans le monde entier. « C’est assez impressionnant, a-t-elle dit. La personnalité de l’empereur fascine, et au-delà de la France. »

Elle est bien placée pour le savoir : elle a coordonné l’intégration d’une partie de la collection du milliardaire québécois Ben Weider aux inventaires du Musée des beaux-arts de Montréal. Lui-même était fasciné par Napoléon au point d’accumuler des centaines d’artefacts liés à ce personnage historique.

La muséologue craint toutefois que la grande valeur monétaire des pierres et des métaux précieux ne puisse convaincre les voleurs de vendre les bijoux en pièces détachées.

La salle du Louvre où le cambriolage a été commis est appelée Galerie d’Apollon, en raison de la thématique de sa décoration. Elle abrite plusieurs autres artefacts qui font partie des joyaux de la Couronne de France, notamment le Régent, un diamant considéré comme parmi les plus gros et les plus purs sur la planète.

Série noire

Ce n’est pas le premier cambriolage à entacher la réputation du monde muséal français dans les dernières semaines.

Dans la nuit du 3 au 4 septembre dernier, le Musée national Adrien Dubouché de Limoges s’est fait dérober trois pièces anciennes de céramique chinoises d’une valeur de plus de 6,5 millions d’euros. Les malfaiteurs ont pénétré dans l’institution en faisant éclater une vitre.

« Le système de sécurité a fonctionné, mais il faudrait peut-être le revoir », a laissé tomber le maire de Limoges à la presse française.

Comme trois pièces précises ont été dérobées, « ce sont vraisemblablement des collectionneurs qui donnent des ordres pour dérober ces pièces, en s’adressant à la très haute criminalité », a-t-il ajouté.

Dix jours plus tard, un groupe de voleurs s’est emparé de pépites d’or totalisant plusieurs kilos dans la collection du Muséum national d’histoire naturelle, à Paris. Les voleurs ont forcé une porte de service avant d’ouvrir une vitrine sécurisée à l’aide d’un chalumeau.

Au total, c’est l’équivalent de 600 000 euros en or qui a été volé. Mais les pépites en question avaient aussi une valeur historique ou scientifique : l’une d’elles avait appartenu au tsar Nicolas 1er, une autre avait environ 1 milliard d’années et faisait 5 kilos. « L’idée que ce soit juste fondu pour faire des lingots, ça nous désespère », avait déploré Gildas Illien, directeur délégué des collections, à France Info.

La semaine dernière, le Musée du président Jacques Chirac, en Corrèze, a lui aussi été la cible d’un vol. Le butin des malfaiteurs était d’une valeur d’environ 1 million d’euros. Cet établissement rassemble tous les cadeaux diplomatiques reçus par le président Chirac pendant ses deux mandats.

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