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Coup d’État déjoué au Bénin | Le bloc ouest-africain envoie des troupes pour soutenir Cotonou

(Cotonou) Les autorités du Bénin ont affirmé dimanche avoir déjoué une tentative de coup d’État visant à renverser le président Patrice Talon, lequel a assuré que la situation était « totalement sous contrôle » et à qui le bloc ouest-africain de la CEDEAO va envoyer un soutien militaire.


Publié à
9 h 00

Mis à jour à
17 h 35

Cette tentative de putsch intervient à quelques mois du départ de la présidence de Patrice Talon, après deux mandats à la tête de ce petit pays d’Afrique de l’Ouest à la croissance robuste, mais miné par des violences djihadistes dans sa partie nord.

L’Afrique de l’Ouest est particulièrement secouée par l’instabilité politique depuis le début de la décennie avec des coups d’État au Mali, au Burkina Faso et au Niger – deux voisins du Bénin –, ainsi qu’en Guinée et plus récemment, fin novembre, en Guinée-Bissau.

Dimanche matin, après des tirs près de la présidence, des militaires avaient fait irruption à la télévision nationale pour annoncer la destitution du président Talon, invoquant pêle-mêle la « dégradation de la situation sécuritaire » ou la remise en cause des « libertés fondamentales ».

Quelques heures plus tard, le ministre béninois de l’Intérieur, Alassane Seidou, est apparu à son tour à la télévision nationale pour assurer que le coup avait été déjoué.

PHOTO CHARLES PLACIDE TOSSOU, REUTERS

Des soldats patrouillent devant le siège de la radiotélévision béninois à Cotonou, au Bénin, le 7 décembre 2025.

C’est ce qu’a confirmé Patrice Talon dans une courte adresse à la Nation dimanche soir, affirmant que la situation était « totalement sous contrôle » et que la « sécurité et l’ordre public seront maintenus partout sur le territoire national ».  

« Cette forfaiture ne restera pas impunie », a-t-il ajouté, après avoir félicité les militaires de la garde républicaine à son arrivée au palais présidentiel.

La France, ancienne puissance coloniale, a condamné dimanche soir la tentative de coup d’État et a appelé ses ressortissants « à la plus grande prudence et notamment à rester confinés », en raison d’« un contexte à cette heure encore volatil ».

Après une journée où la plupart des habitants ont vaqué à leurs occupations à Cotonou, la capitale économique s’est vidée un peu plus tôt que d’habitude dans la soirée, selon un journaliste de l’AFP.

Plusieurs barrages militaires étaient déployés dans la zone de la présidence et du camp militaire voisin de Guézo.

« Ce soir, on va essayer de rentrer plus tôt. On ne sait pas qui est à la base de ce coup d’État », a expliqué à l’AFP Michelle Eudoxie, une coiffeuse de 50 ans.

« Ce matin j’ai commencé à entendre les sons des balles. J’ai quitté le quartier pour aller ailleurs parce que j’ai eu peur », dit de son côté Nabil Sacca, un vendeur d’essence qui se trouvait près du palais présidentiel dans la matinée.

Déploiement de troupes ouest-africaines

Selon des sources militaires à l’AFP, une douzaine de soldats ont été arrêtés. Parmi eux figurent certains auteurs de la tentative de putsch, a indiqué une source sécuritaire sans préciser si le meneur des mutins, le lieutenant-colonel Pascal Tigri, figurait parmi eux.

Selon une source proche du dossier, il est en fuite.

La présidence nigériane a affirmé avoir mené dimanche des frappes à Cotonou à la demande du Bénin pour notamment aider « à déloger les putschistes de la télévision nationale et d’un camp militaire où ils s’étaient regroupés ».

« Des forces nigérianes au sol sont actuellement au Bénin », a ajouté Abuja dans son communiqué.

La Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) a de son côté annoncé le « déploiement immédiat » de troupes du Nigeria, de la Sierra Leone, de la Côte d’Ivoire et du Ghana pour soutenir « le gouvernement et l’armée républicaine » du Bénin et « préserver l’ordre constitutionnel ».

La Force en attente de la CEDEAO a le mandat de garantir la paix et la stabilité de la région. Elle s’est par exemple déployée en Gambie en 2017 lorsque le président sortant Yahya Jammeh refusait de quitter le pouvoir.

Elle avait toutefois finalement renoncé à intervenir en 2023 après le coup d’État au Niger.

L’Union africaine (UA) a condamné « fermement et sans équivoque » cette tentative de coup d’État.

L’histoire politique du Bénin a été jalonnée de plusieurs coups d’État ou tentatives, mais le dernier remonte à 1972.

« Aujourd’hui, c’est comme si je revivais ce que nos parents ont vécu en ce temps-là », raconte Remy Agblo un commerçant.

Patrice Talon, au pouvoir depuis 2016, arrivera en 2026 au terme de son second mandat, le maximum autorisé par la Constitution.

PHOTO BENOIT TESSIER, ARCHIVES REUTERS

Patrice Talon, président du Bénin

Son dauphin désigné, l’actuel ministre des Finances Romuald Wadagni, fait figure d’ultra-favori pour la présidentielle d’avril 2026, le principal parti d’opposition ayant été écarté de la course.

« Il y a une tension perceptible dans le pays depuis des mois du fait des élections », pointe Anatole Zinsou, informaticien à Cotonou qui déplore « l’exclusion » de certains acteurs des processus électoraux.

S’il est salué pour le développement économique du Bénin, Patrice Talon est régulièrement accusé par ses détracteurs d’avoir opéré un virage autoritaire dans un pays autrefois salué pour le dynamisme de sa démocratie.

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